Résumé: Le Meilleur des Mondes
Martin van Creveld
Les événements du 11 septembre 2001, bien que souvent ainsi présentés, ne représentent en aucun cas le tournant de l’histoire universelle, mais plutôt une succession de suites logiques qui font partie intégrante de l’histoire de l’humanité, histoire qui fut toujours marquée par les guerres et des aspirations au pouvoir, mais qui atteignit toutefois une dimension jusqu’alors inconnue avec le largage de la bombe atomique sur Hiroshima. L’arsenal des armes nucléaires empêcha la guerre entre les grandes puissances et, de même mesure que le nombre des guerres transnationales baissa, on réduisit les forces armées dans le monde entier.
Depuis le 17e siècle, les guerres interétatiques dominèrent en Europe ; elles firent de l’ombre aux autres formes de querelles telles que les rebellions, les révolutions, les guerres civiles ou les guérillas dans les autres parties du monde. Depuis le patt nucléaire après 1945, ces formes de querelles furent remplacées par des guerres d’organisations non gouvernementales ou contre cellesci voire entre celleslà dont les caractéristiques sont de ne pas disposer d’un territoire national souverain ou de frontières reconnues. Ses combattants, qui ne peuvent être distingués de la population civile ou de ses ennemis n’utilisent pas un grand nombre d’armes lourdes, très développées, et mènent une guerre sans limites au sein de la population civile et qui est bien souvent l’objectif ou l’objet de représailles.
Après 1945, cette forme de querelles se limitait d’abord au dit Tiers-Monde, elle se propagea cependant au « deuxième Monde » (ancien bloc de l’est) après 1990/91. Avec les attaques contre le World Trade Center et le Pentagone, cette sorte de guerre toucha désormais la première puissance mondiale qui essaya de réagir avec des forces armées qui étaient presque les mêmes que celles qui auraient été déployées lors d’une guerre éventuelle contre l’Union soviétique. Ces forces armées américaines n’étaient ni équipées ni formées dans le domaine de la lutte antiterroriste ; c’est pourquoi le gouvernement de M. Bush transféra également la querelle en Afghanistan et y dispersa les Talibans.
Parler d’une « victoire » serait exagéré parce que les Talibans furent essentiellement déposédés de leur grandes armes ; de même, on ne put avec cet engagement pas venir à bout de grandes parties du réseau d’Al-Qaida parce que l’organisation terroriste est répandue dans plusieurs états et que ses bailleurs de fonds ne se trouvaient voire ne se trouvent même pas en Afghanistan. De plus, une victoire rapide dans la guerre en Irak contre le terrorisme ne signifierait rien.
On ne pourra pas aller au devant des nouvelles menaces avec des forces armées conventionnelles ; il sera nécessaire de confier ces taches à des forces spéciales, ce qui va exiger un renforcement de l’autorité publique allant jusqu’à la création d’un état policier. Les conséquences pourraient en être l’affaiblissement des droits de l’Homme et du citoyen allant même jusqu’à l’introduction de la torture à des fins d’obtention d’information. Un réel boom des services privés de sécurité pourrait être une autre évolution qui remettrait le monopole de la force publique en question.
Il paraît acquis que la vie dans ce « meilleur des mondes » marquée par le danger de la terreur sera incommode et précaire, ce qui se manifestera par des contrôles strictes, parfois même également par du harcèlement ; ce qui ne sera supportable en première ligne que par l’effet d’accoutumance.
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